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Peut-on adopter un chat "sauvage"?

Un joli minet déambule depuis quelque temps dans votre jardin et se prélasse au soleil, il vous observe de loin et se laisse parfois caresser. Vous vous prenez d’affection pour lui et vous demandez s’il serait possible de l’adopter et de lui offrir le confort de votre demeure avant l’hiver qui se profile ? Voici tous mes conseils pour bien faire les choses.



Un chat sauvage ?


Qu’entend-t-on par chat sauvage ? La définition est importante car le chat sauvage européen, Felis silvestris silvestris de son petit nom latin, est une espèce différente de notre chat domestique.


Vous pourrez exceptionnellement observer un chat sauvage européen dans nos forêts vosgiennes ou alpines, mais de par sa nature extrêmement craintive et discrète, il faut s’armer d’une grande patience et surtout avoir beaucoup de chance. De taille et d’aspect similaires à notre chat classique, il est marron tigré et sa queue est annelée de noir. Oubliez de suite une quelconque aventure avec ce félin qui vit exclusivement en liberté.


Le chat domestique, Felis silvestris catus, est une espèce qui comprend les chats de maison (communément appelés « chats de gouttière »), les chats errants et les chats de race. La différence de dénomination se situe au niveau du mode de vie et de l’influence directe de l’être humain sur la reproduction. Le chat de race provient originellement de l’accouplement de deux chats « basiques » qui ont donné des chatons d’une couleur et d’une morphologie particulières que les humains ont gardés, sélectionnés et reproduits afin d’en tirer un type reconnaissable et constant. Le chat de maison (aussi appelé « européen » de manière erronée puisqu’il s’agit là d’une race reconnue avec un pedigree LOOF) est le chat le plus commun de diverses couleurs et zébrures, plus ou moins grand, c’est le minet de monsieur et madame Tout-le-monde qui n’appartient pas à une race reconnue. *


Le chat errant, appelé aussi haret ou marron en fonction de sa proximité avec l’humain, n’a pas de propriétaire. Il peut vivre en groupe près des ressources de nourriture ou en solitaire, plus ou moins éloigné des villes. Il est dit « domestique » mais sa capacité à vivre captif ou près de l’humain va varier en fonction de nombreux facteurs.


Celui dont il question dans ce sujet est bien le Felis silvestris catus vivant en extérieur et qui n’a, à priori, pas de propriétaire. Alors, comment faire si on souhaite intégrer ce minet dans la famille ?


Observation et patience


La première chose à faire pour savoir s’il est envisageable d’adopter ce chat qui vous fait de l’œil, c’est de l’observer. Vient-il régulièrement dans votre jardin se reposer, chasser ? Il peut s’agir d’un chat de passage qui a épuisé momentanément ses ressources de chasse et qui repartira aussi vite qu’il est venu. Vient-il vers vous, se laisse-t-il caresser ? S’il est impossible pour vous de le toucher ou de l’approcher à moins d’un mètre, même après plusieurs semaines, laissez tomber, ce chat n’est pas fait pour la cohabitation avec l’humain et il sera bien plus heureux en liberté.


Petite astuce : bien qu’il ne soit pas fait pour vivre à vos côtés, il peut rechercher de la chaleur et de la nourriture, surtout en hiver. Vous pouvez alors lui aménager dans le fond de votre jardin un carton avec quelques couvertures et une gamelle de croquettes pour pallier aux jours les plus durs. Vous aurez alors la chance de l’observer chasser, se prélasser et faire des cabrioles !


Au contraire, si monsieur le chat vient à vous, se frotte dans vos jambes et semble apprécier les caresses, il est probablement habitué à l’humain. Il faut dans ce cas vérifier avant tout que ce chat n’appartient à personne, car peut-être que ses humains le recherchent. Parfois, il sera rendu mais ne voudra pas rester chez ses anciens propriétaires parce qu’il y a eu des changements dans sa maison qui lui sont devenus insupportables : arrivée de bébé, adoption d’un autre chat ou d’un chien… Dans ce cas, voyez avec les personnes qui voudront peut-être bien vous le laisser plutôt qu’il traîne dans la rue.


Vous pouvez emmener le chat chez le vétérinaire pour vérifier son identification par puce électronique ou par tatouage. Les annonces sur les sites perdu/trouvé et les réseaux type Pet Alert peuvent aider à réunir chat et propriétaire.



Si minet ne semble appartenir à personne, alors la deuxième étape commence !


Faire les choses en douceur


Il ne s’agira évidemment pas d’attraper le chat et de l’enfermer coûte que coûte dans la maison en espérant qu’il s’y habituera : c’est le meilleur moyen de le faire paniquer et de lui donner envie de fuir à toutes jambes ! Commencez par évoluer près de lui régulièrement en faisant, par exemple, votre jardinage ou en étendant votre linge. Les chats sont de grands observateurs, et il pourra ainsi s’habituer à vous et prendre confiance.


Ensuite, appelez-le en vous accroupissant : ainsi, vous paraissez moins impressionnant. Présentez-lui votre main pour qu’il la renifle, et ne le caressez que s’il semble prêt. La tête ou le cou sont à privilégier, le reste du corps et la queue sont souvent moins bien tolérés, surtout quand le chat ne connaît pas la personne. Répétez l’opération aussi souvent que possible jusqu’à ce que le chat semble venir chercher lui-même les caresses.


En parallèle, proposez-lui la sacro-sainte nourriture (croquettes, pâtée, thon, etc.) quand vous le voyez et rapprochez à chaque fois la gamelle de votre domicile. Évitez le lait qui peut provoquer des diarrhées à cause de la forte concentration en lactose qui est mal digéré par le chat si donné en trop grande quantité.



Quand le chat semble se sentir à l’aise dans votre jardin, laissez une fenêtre ouverte pour qu’il s’invite dans votre intérieur. C’est une étape cruciale que certains passeront aisément, alors que d’autres mettront plus de temps. L’important étant de ne pas refermer la fenêtre dès qu’il sera rentré, sinon il se sentirait piégé ! Il perdra alors confiance, ce qui au mieux ralentira les choses, et au pire le fera fuir définitivement.


Laissez-le renifler, déposer ses odeurs en se frottant aux meubles, dormir près de la cheminée ou du radiateur et surtout, laissez-le ressortir quand il en a envie. Au fur et à mesure, il prendra totalement confiance dans cette maison et ses habitants. La nourriture étant souvent une association positive qui renforce le ressenti, n’hésitez pas à lui en proposer quand il est à l’intérieur.


Les choses suivront leur cours et très vite, chez vous, ça sera chez lui.


Les bases de la cohabitation


En pratique, et ce pour tous les chats, des règles de base sont à respecter pour vivre harmonieusement ensemble. Le chat est un animal qui a besoin de support adéquats pour déposer ses odeurs.


Pour le marquage urinaire : deux litières a minima pour un chat avec une bonne couche de substrat dont on enlèvera les déjections et urines (tous les deux jours ou tous les jours un bac sur deux), sans couvercle (le chat a besoin d’observer l’environnement à ce moment où il est vulnérable) et surtout sans parfum, sera idéale. Pour le marquage par griffades, un ou deux poteaux-griffoirs en sisal et idéalement un arbre à chat placés dans les pièces de vie éviteront les griffades sur le canapé, les murs ou les meubles. Proposez-lui de la nourriture (au moins 50% de pâtée humide) à volonté et de l’eau fraîche : le chat se régule souvent très bien seul dans la plupart des cas et ceci évitera les frustrations liées à la faim (le chat mange environ une douzaine de petits repas en 24 heures). Pour les gloutons, des gamelles ludiques qui font travailler le chat mentalement et physiquement existent et sont très efficaces.


Évitez de la caresser en permanence, ce contact peut être mal toléré par les chats qui n’en ont pas l’habitude. Si vous l’embêtez à un mauvais moment ou si le chat n’est pas un adepte des caresses, il pourra vous mordiller la main pour vous signifier son inconfort : ne le punissez pas, il a le droit – comme vous – de ne pas apprécier tout ce qu’on lui propose. Apprenez à connaître votre compagnon, et ce qu’il apprécie ou non.


D’un point de vue médical, une visite chez le vétérinaire s’impose pour vérifier son état général. Si vous possédez d’autres chats et pour éviter des contaminations, cette visite doit se faire dès que possible. Il faudra également le vacciner mais aussi le pucer (obligation légale) pour officialiser cette adoption et vous déclarer comme propriétaire de votre nouveau compagnon.


Primordial : la castration ou la stérilisation du chat, si cela n’a pas été déjà effectué, permettra d’éviter les portées non désirées, les fugues, les bagarres mutilantes et les marquages urinaires sexuels. Vous soulagerez aussi le chat des tensions liées aux hormones, et réduirez les risques de tumeurs mammaires chez la femelle.


N’oubliez pas non plus et c’est extrêmement important : le chat recueilli a eu l’habitude de vivre dehors avec tous les stimuli afférents, il est donc inenvisageable de lui interdire dorénavant l’accès à l’extérieur. Si vous ne souhaitez pas faire le portier ou tout simplement si vous n’êtes pas chez vous en permanence, pensez à installer une chatière. Un modèle à reconnaissance de puce électronique ne fonctionnera qu’avec votre chat et aux heures que vous aurez choisies.



Et quand on a déjà un animal ?


La plus grosse erreur à commettre quand on met en contact des animaux destinés à cohabiter, c’est d’intervenir dans leurs interactions. Le souci réside dans notre anthropomorphisme naturel, dans le réflexe d’imaginer à leur place ce que peuvent et doivent ressentir les chats ou les chiens. Pour eux, il s’agira de s’appréhender, de se renifler pour connaître la carte d’identité de l’autre, de s’apaiser, de s’ajuster. Pour un chat, cracher, feuler, faire le gros dos dans un premier temps est tout à fait classique et normal, il serait contre-productif de réfréner cette communication. Votre intervention pour disputer et dire « ce n’est pas bien » d’accueillir ainsi le nouvel animal, c’est prendre le risque de créer une association mémorielle négative : « ce chat ou ce chien est à éviter à tout prix. » En plus de devoir s’adapter à ce nouveau venu, votre chat perçoit qu’en sa présence, vous le disputez. Il risque alors de manifester un peu plus d’agressivité et bien souvent, c’est à votre désarroi car vous imaginez qu’ils ne s’entendront jamais bien, alors rebelote, vous criez et c’est le cercle vicieux...


Une autre erreur importante est de forcer le contact, en portant le chat par exemple, et de l’apporter contre son gré à l’autre chat/chien : vous risquez non seulement de vous faire griffer mais pris au piège de vos bras, le chat se sentira prisonnier et la première impression au contact de l’autre sera là aussi négative.


Ainsi, la règle d’or est : ne jamais intervenir dans les interactions animales ! Prévoyez plutôt d’aménager l’espace de rencontre en privilégiant des cachettes en hauteur si votre chat veut se soustraire, prévoyez une litière en plus pour leur permettre de communiquer, au moins deux gamelles différentes même si elles sont dans la même pièce. Restez en retrait et soyez le plus neutre possible dans vos attitudes. Faites attention à vos micro-expressions faciales et corporelles, vos animaux savent très bien les décoder ! Vous êtes leur être d’attachement et si vous semblez calme, le chat en sera d’autant plus apaisé. Si vraiment les rencontres se terminent en grosses bagarres, n’hésitez pas à faire appel à un comportementaliste qui pourra vous proposer des protocoles spécifiques.


Pour les premières nuits, il est judicieux également de ne pas faire dormir le nouveau chat et l’autre chat/chien dans la même pièce pour que chacun puisse se reposer des émotions de la journée sans avoir à se méfier de l’autre.

 

Par Gwendoline Le Peutrec Redon - Comportementaliste spécialiste du chat, créatrice d'Animautopia et formatrice


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