Parmi les près de 15 millions de chats en France, une très grande majorité sont libres et entrent et sortent de leur maison à leur guise, mais un nombre croissant vit aujourd’hui captif en maison ou en appartement. Alors quand viennent les vacances, beaucoup de propriétaires souhaitent offrir la liberté à leur chat… mais est-ce vraiment une bonne idée ?
Chat libre ou chat captif ?
Nous n’évoquerons ici que les chats qui ont un propriétaire attitré puisque les autres petits félins (harets) ne sont pas concernés par cette problématique.
Nous avons trois grandes catégories de dyades humain-chat dans les foyers français :
- Les chats complètement libres qui vont et viennent dans leur habitat au gré de leurs envies, notamment par des systèmes de chatières
- Les chats qui peuvent avoir accès à l’extérieur sur demande et dont les propriétaires jouent le rôle de « portiers » (l’amplitude des sorties pouvant être plus ou moins grande)
- Et enfin les chats dits captifs, qui n’ont aucun accès à l’extérieur.
Questions de conviction, de pratique, d’organisation, de protection et de sécurité, les raisons sont multiples et personnelles à chacun des propriétaires avec plus ou moins de pertinence, on se l’accorde !
Cela dit, les familles ayant un chat qui ne sort pas – mais qui aimeraient pouvoir le faire – accueillent les vacances comme une bonne occasion d’offrir le cadeau de la liberté pendant cette période. Minet, qui vit donc habituellement dans son 50 m2 parisien, va avoir droit aux joies de la vie extérieure pendant 2 ou 3 semaines, dans les champs qui bordent la jolie location de vacances dans le Var… à lui le vent dans la fourrure, le son des oiseaux dans les grands arbres, le crissement des pas feutrés des musaraignes dans les épis de blés, les troncs et les abris naturels pour dormir au soleil et la possibilité d’explorer un territoire infiniment grand… Eh oui, vu ainsi, pourquoi l’en priverait-on ?
Un cadeau empoisonné
Dans ce beau tableau, il y a toutefois un problème inéluctable : le retour à la maison. C’est bien là que pèchent toutes ces bonnes intentions… En effet, ce chat aura découvert une multitude de stimuli qui sont ceux de son biotope de base, il aura pu exprimer des comportements propres à son espèce parfois non ou difficilement réalisables en captivité, il aura développé de nouveaux réflexes, fait de nombreux apprentissages qui se traduisent physiologiquement par une multiplication des connexions neuronales et, d’un coup, il se retrouve à nouveau dans un environnement plus ou moins appauvri. Cela ne veut pas dire que les personnes ne proposent rien d’intéressant à leur chat chez eux mais que, par essence, les stimulations de la nature sont infiniment plus nombreuses, complexes et variables.
Le chat (felis silvestris catus) est une espèce attachée à son domaine vital et solitaire qui s’est développée dans un environnement précis qui est bien loin de l’intérieur douillet de nos foyers. Alors, quand celui qui vit habituellement captif découvre l’émulation que provoque une sortie, il est très difficile pour lui de ne pas y prendre goût.
C’est ainsi que les comportementalistes observent une flambée de consultations au mois de septembre, après les grandes vacances, pour divers problèmes de comportement : éliminations hors litière, griffades démultipliées, agressions, miaulements nocturnes, apathie…
Il se passe une chose très simple : le chat est en état de frustration intense ! En effet, toutes les aptitudes qu’il a développées, toutes les activités qui l’ont défoulé, tous les instincts qu’il a comblés, ne peuvent plus s’exprimer. Oui, mais avant ? Eh bien justement, avant, il ne les avait pas expérimentés, avant, il s’était adapté à ce qu’il avait toujours connu : la vie en intérieur.
Alors que faire ?
Si vous avez le choix, il vaut mieux laisser votre chat chez vous quand vous partez en vacances. En sa qualité d’animal attaché à son domaine de vie, il sera moins déboussolé par votre absence que par le changement d’environnement. Je dois préciser toute de même que certains chats pourront tout de même apprécier ce changement et que certains autres, très (trop ?) attachés à leur propriétaire vivront moins mal le déplacement que la séparation. Attention néanmoins : cela ne représente pas la majorité des cas !
Si le chat reste à la maison, il faudra bien sûr prévoir le passage de quelqu’un qui s’occupera de la litière, des gamelles et qui vérifiera que tout va bien. De plus en plus de professionnels proposent aujourd’hui leur service de cat-sitting, il est donc plus facile qu’à une certaine époque de trouver une personne pour s’occuper de son chat. Pensez toutefois évidemment à vérifier les compétences et la formation du cat-sitter auquel vous ferez appel pour vous assurer de confier votre chat à un professionnel de confiance.
Quand on n’a pas le choix et que l’on doit emmener son chat captif en vacances, je vous conseille, pour les raisons évoquées ci-dessus, de ne surtout pas le laisser sortir, même un peu. Par contre, aménagez-lui des espaces bien à lui dans la location : un endroit pour dormir ou surveiller en hauteur, un griffoir, sa nourriture habituelle... Pensez également à lui proposer des jeux d’exploration ou de prédation comme des souris avec de l’herbe à chat, des petites balles avec grelots ou encore une canne à pêche avec des plumes. Ainsi, il sera moins déstabilisé et vous éviterez quelques soucis liés au stress d’avoir quitté son domaine vital.
Par Gwendoline Le Peutrec Redon, comportementaliste spécialiste du chat et fondatrice d'Animautopia
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